Un jeune militant d'extrême gauche âgé de 18 ans est en état de mort cérébrale, jeudi 6 juin, après une altercation avec des skinheads, mercredi, à Paris. Clément Méric, étudiant à Sciences Po, où il était engagé dans le syndicat Solidaires, était membre d'Action antifasciste. Dans un communiqué, le ministre de l'intérieur, Manuel Valls, a assuré, jeudi matin, de "sa totale détermination à éradiquer cette violence qui porte la marque de l'extrême droite".
La victime et trois de ses amis se trouvaient dans un appartement de la rue de Caumartin, dans le 9e arrondissement de Paris, en fin d'après-midi, pour participer à une vente privée de vêtements de plusieurs marques appréciées par les jeunes militants issus à la fois de l'extrême gauche et de l'extrême droite.
Vers 18 heures, deux hommes et une femme arrivent dans l'appartement. Selon les premiers témoignages recueillis par les policiers, ils appartiennent visiblement à la mouvance skinhead : tatouages de croix gammées, sweat-shirt "Blood and honour", un groupe néo-nazi britannique, etc. Entre les deux groupes, les invectives fusent rapidement. Les militants d'extrême gauche moquent la tenue des nouveaux arrivants.
"VIOLENT COUP DE POING"
Selon une source policière, c'est à ce moment-là que la victime et ses amis – moins identifiables à première vue – révèlent leur engagement politique antifasciste. Quelques minutes plus tard, ils quittent l'appartement, et, les provocations continuant, proposent aux skinheads de venir en découdre dans la rue. Ces derniers appellent du renfort avant de les rejoindre.
Dans la rue de Caumartin, une voie piétonne très commerçante située derrière les Grands Magasins du boulevard Haussmann, les deux groupes se retrouvent ainsi à quatre contre quatre. Mais la rixe ne dure pas longtemps. Clément Méric, qui n'a pas encore commencé à se battre, reçoit un "violent coup de poing", selon les témoins. Le jeune homme, qui est loin d'avoir la carrure de ses adversaires – il est même plutôt frêle –, chute et sa tête heurte un poteau. Il perd connaissance. Rapidement transféré à l'hôpital de La Pitié-Salpêtrière (Paris-13e), il ne se réveillera pas.
Entre-temps, les agresseurs se sont enfuis. Les investigations ont été confiées à la police judiciaire parisienne. Les enquêteurs disposent de la vidéosurveillance, très présente dans la rue, et de nombreux témoignages – le mercredi après-midi, il y a foule. Jeudi matin, les trois amis de la victime n'avaient pas souhaité déposer plainte.
"L'HORREUR FASCISTE VIENT DE TUER EN PLEIN PARIS"
Mais l'agression prend rapidement un tour plus politique lorsque le Parti de gauche est alerté. Alexis Corbière, conseiller de Paris et secrétaire national du mouvement de Jean-Luc Mélenchon, dénonce dans un communiqué, à 23 heures, "l'horreur fasciste vient de tuer en plein Paris" et désigne le "Groupe JNR (Jeune nationaliste révolutionnaire)" – ce qui a été démenti à l'AFP par le leader du JNR, Serge Ayoub. Aucun élément ne permet d'établir, pour l'instant, à quel groupuscule les agresseurs peuvent appartenir.
Le maire de Paris, Bertrand Delanoë, dénonce à sa suite dans un communiqué "l'agression mortelle perpétrée par des militants d'extrême droite". "Je souhaite que la police et la justice parviennent à identifier rapidement les coupables et à prendre toutes les mesures qui s'imposent", a-t-il ajouté.
De son côté, Marine Le Pen, présidente du Front national (FN), a rapidement réagi aux accusations portées contre l'extrême droite, en assurant que son parti n'avait aucun rapport, ni de près ni de loin avec "ces actes inadmissibles et insupportables". "Je m'associe à la peine de ceux qui ont milité avec lui car, même si nous ne partageons pas les mêmes idées, je trouve que c'est épouvantable", a-t-elle déclaré.
Un rassemblement à l'appel du Parti de gauche est prévu, jeudi, à 18 h 30, place Saint-Michel. Le premier secrétaire du PS, Harlem Désir, a annoncé jeudi que son parti appelait également à y participer.