Des néonazis européens se donnent rendez-vous dans le sud de la France

Erstveröffentlicht: 
18.05.2013

Venus de tout le continent, des centaines de membres de mouvements d'extrême-droite doivent se retrouver ce week-end dans les Pyrénées-Orientales, dans un lieu pour l'instant tenu secret. Le rassemblement, présenté comme festif, pourrait servir à financer les groupuscules.

 

Un rassemblement de néonazis est attendu dans les Pyrénées-Orientales ce week-end. Selon les informations du journal L'Indépendant et de France Bleu Roussillon, des skinheads et nationalistes extrémistes de plusieurs pays se sont donnés rendez-vous dans ce département, officiellement pour un concert de rock. En réalité, des rencontres entre groupuscules, des séances de tirs et un concours de salut hitlérien pourraient figurer au programme de ce rassemblement.

En novembre dernier, plus de 1500 néonazis s'étaient déjà retrouvés à Toul, en Meurthe-et-Moselle, là encore au motif d'un concert. D'abord prévu en Moselle, le lieu avait changé plusieurs fois, la police ayant eu vent du mot d'ordre. Le mode opératoire semble similaire pour ce week-end: appelés à se rendre dans le département, les participants doivent recevoir au dernier moment l'adresse du meeting. Une salle est généralement louée dans une petite commune, au prétexte d'un mariage ou d'un événement festif afin d'éviter toute interdiction. D'autres rassemblements du même genre auraient d'ailleurs été annulés après avoir été révélés ces derniers mois.


Une tentative pour rallier de nouveaux membres

Ces rassemblements sont organisés plusieurs fois dans l'année. Ils permettent de renforcer les liens du groupe, de financer le mouvement par le prix de l'entrée, la vente de t-shirts et de CD, et de promouvoir l'idéologie. À la différence d'événements similaires, il a cette fois été annoncé dans la presse. Stéphane François, enseignant-chercheur à l'Université de Valenciennes et spécialiste des mouvements d'extrême-droite, s'en étonne, ainsi que du lieu de rendez-vous, habituellement proche de la frontière est. «Le choix est surprenant, sauf si le but est d'attirer des jeunes vers ce groupe et de leur présenter l'idéologie», estime-t-il. Il note que «la frontière espagnole est proche» et qu'il peut y avoir une volonté de se rapprocher des mouvements identitaires existant en Espagne.

Il évoque également la présence de skinheads non-affiliés à Perpignan, principale ville du département, que les organisateurs du meeting pourraient tenter de rallier. Car à l'origine du rendez-vous on trouve le Hammerskin Nation, principale organisation néonazie en Europe. Originaire des États-Unis, présent en Amérique du Nord et surtout en Europe de l'Est, ce mouvement antisémite et xénophobe défend la suprématie de l'homme blanc. «Il s'agit d'une mouvance connue et ancienne», explique Jean-Yves Camus, chercheur au CNRS, politologue et spécialiste des mouvements nationalistes. Il compterait en France quelques centaines de membres

 

Un «jeu de piste» avec les forces de l'ordre

Mais même si ces groupes sont connus, ce genre de rassemblement est difficile à anticiper. «On assiste souvent à un jeu de piste avec les forces de l'ordre», résume Stéphane François. «La police, mais aussi les militants antifascistes les incitent à rester dans la clandestinité», précise-t-il. Ce week-end, le meeting pourrait avoir lieu dans un lieu privé, ce qui complique l'action des forces de police.

De nombreux moyens techiques ont été mis en place, avec une unité mobile de gendarmerie appelée en renfort sur place, et une autre prête à être déployée. Les forces de l'ordre pourront intervenir dans le cas de port de sigles interdits ou de gestes incitant à la haine raciale. Elles restent également vigilantes concernant des actions antifascistes qui pourraient avoir lieu. Des collectifs se sont déjà rassemblés vendredi dans le centre-ville de Perpignan en signe de protestation.

Ces meetings réguliers ne présagent pas de l'importance du mouvement skinhead en France, selon Jean-Yves Camus. «Leur organisation ne répond pas à une logique purement nationale», analyse-t-il. Il rappelle que «Toul était à un carrefour», non-loin de la Belgique, l'Allemagne, le Luxembourg, les Pays-Bas. De ce point de vue, le rendez-vous de ce week-end pourrait attirer moins de participants. Le choix de la France s'explique également par la législation: impossible d'organiser un rassemblement néonazi en Allemagne, par exemple, où ces groupes sont extrêmement surveillés.